L’artiste Stanislao Di Giugno a été choisi en collaboration avec Zerynthia de Rome, associazione per l’arte contemporanea, et le chef de service de pédiatrie de l’hôpital de la Sapienza, le Pr Castello, dans le but de créer une œuvre d’art qui pourrait améliorer l’accueil du hall d’entrée de la clinique pédiatrique.
L’espace d’entrée de la clinique pédiatrique était froid et vétuste, bordé de deux hautes vitrines.
L’intervention de Stanislao Di Giugno transforme la perception de cet espace en utilisant la transparence-opaque des verrières colorées en bleu et en y ajoutant une lumière changeante.
L’artiste romain a modifié les deux vitrines en leur appliquant un film coloré et transparent de différentes graduations de bleu. Au plafond des deux vitrines une lampe sphérique avec une lumière blanche a été installée. Au lieu d’être accrochée directement au plafond, la lampe est suspendue à un mécanisme qui lui permet une rotation lente et continue. La lampe est peinte à la main avec un motif ondulé qui, en tournant, projette sur la vitre colorée ombre et lumière, créant l’effet de l’eau en mouvement.
Ainsi, cheminant de la porte d’entrée jusqu’à l’atrium, on voit symétriquement à droite et à gauche deux ambiances aquatiques en mouvement à l’intérieur des vitres, comme si on regardait la mer au-dessus de l’eau.
L’œuvre a été inaugurée le 21 juin 2006.
Francesco Nucci : « Depuis toujours, l’union entre l’art et la science a été un élément pivot dans l’histoire de l’homme et nombreux sont les liens qui unissent ces deux disciplines apparemment distinctes.Le projet de réaliser une œuvre d’art permanente pour la clinique pédiatrique de Rome est une initiative importante pour deux raisons. Premièrement, cette initiative est une invitation à introduire l’art contemporain dans des structures publiques comme l’hôpital. Cela permet de valoriser ces espaces et surtout, de créer une atmosphère réconfortante pour les personnes qui connaissent une émotivité intense lorsqu’elles viennent dans ces lieux. La seconde raison concerne l’importance de ce lieu singulier pour la recherche artistique qui peut susciter des solutions novatrices appropriées dans le champ de l’art.
Pour la réalisation du projet de la clinique pédiatrique, il a été demandé à quatre artistes de réaliser une œuvre qui dialoguerait avec l’espace et avec les personnes. Le projet choisi de Stanislao di Giugno a la capacité de transformer et de valoriser l’espace en exaltant la structure préexistante. La possibilité d’enrichir à travers l’art un lieu d’une telle importance comme l’entrée de la clinique pédiatrique est le signe que l’art et la médecine peuvent dialoguer toujours plus intensément.
Zerynthia : L’artiste qui accepte d’intervenir dans ces espaces hospitaliers ne veut ni décorer les espaces ni les illustrer de théories scientifiques. Il ne se substitue pas non plus à la présence du personnel para médical ou éducatif. L’artiste apporte dans les hôpitaux son propre univers, qui inclut des zones de lumière mais aussi des zones d’ombre. Nous pensons que c’est la créativité de l’artiste, sa capacité à donner une expression à son monde, qui contient une énergie très forte capable d’avoir un effet positif sur les espaces de soins. Cette confrontation dans un lieu aussi dramatique, porteur de souffrance est très importante.Pour les patients, grands et petits, et pour leurs amis et parents, la journée à l’hôpital est synonyme d’angoisse, d’attente interminable et d’ennui.Dans ce contexte, l’artiste introduit le jeu comme thérapie virtuelle qui, spécialement en pédiatrie, constitue une antidote probable au mal être. L’enfant n’étant pas en état d’évaluer sa maladie, la subit. Réussir à le distraire, à capturer son imagination, ou simplement l’aider à passer le temps, est parfois suffisant pour qu’il retrouve le sourire. L’œuvre conçue et réalisée par Stanislao di Gigno pour la clinica pediatrica du policlinico de Rome remplit toutes les conditions dans cette stratégie du mieux-être. »
Stanislao di Giugno : « Le projet concernait un espace gris et vétuste. L’intervention dans sa simplicité, sans modifier l’architecture, en transforme la perception, en utilisant la lumière… En passant la porte du hall d’entrée, nous verrons symétriquement à droite et à gauche deux parois de verre fermées qui sembleront remplies d’eau en mouvement, comme si l’on regardait la surface de la mer en se tenant sous l’eau. L’environnement offrira alors une coloration légèrement céleste, pas très intense, contrastant avec la lumière naturelle qui arrive de l’extérieur, du hall d’entrée et des corridors adjacents qui continueront de fonctionner comme actuellement. Le hall ne sera plus une ambiance froide par où l’on transite rapidement, mais un espace à découvrir, une expérience ludique, une exploration elle-même. »
Conversation entre Lorenzo Benedetti et Stanislao di Giugno
> Lorenzo Benedetti : Dans les recherches artistiques des dernières années, le contexte est utilisé comme élément intrinsèque de l’œuvre d’art. Le lieu a un effet de première importance non seulement pour l’échange œuvre-visiteur, mais aussi pour la création de l’œuvre elle-même. Les espaces d’un niveau particulièrement sensibles sont fondamentaux pour la création d’œuvres novatrices. Les projets pensés pour les espaces publics soulignent combien le rapport entre l’art et le contexte peut être fondamental tout en ayant l’un et l’autre une forte influence réciproque. Qu’est-ce qui a changé dans ta façon de travailler à cette occasion par rapport aux espaces d’expositions plus conventionnels ?
> Stanislao di Giugno : Le fait que le contenant (l’espace) n’accueille pas une œuvre d’art (le contenu) mais fasse partie intégrante de l’œuvre, transforme sûrement un espace public déterminé, initialement fonctionnel ou vraiment représentatif, en un autre espace anti-fonctionnel et contemplatif, ludique et surréel. Le contenant devient lui-même contenu. Ce glissement en outre, n’est pas seulement formel mais plutôt politique, l’œuvre qui bouleverse l’architecture d’un espace public et touche sans distinction toutes les personnes qui transitent par ce lieu, quitte le statut d’œuvre d’élite destinée à un public sélectionné, exposée dans un espace neutre créé spécialement pour l’accueillir.
> Lorenzo Benedetti : Le projet pour la clinique pédiatrique du policlinico Umberto I de Rome est une intervention qui se marie aussi avec l’architecture préexistante. L’importance de ce projet semble non seulement tenir compte de la mémoire historique du lieu mais semble aussi la valoriser.
> Stanislao di Giugno : Indubitablement cette intervention a à voir avec la valorisation de l’architecture préexistante. Je me suis imposé de ne pas la modifier mais d’exploiter le squelette préexistant et d’en transformer la perception avec l’aide immatérielle de la lumière et de la couleur.
> Lorenzo Benedetti : L’œuvre semble être en osmose avec l’espace de la structure hospitalière. Les moyens utilisés sont la lumière, la couleur et le mouvement, et l’installation semble accentuer le processus physique de ces éléments (la couleur est lumière et la lumière est mouvement). Quelle relation existe-t-il entre cette œuvre et le reste de ton travail ?
> Stanislao di Giugno : J’utilise la couleur, la lumière et le mouvement parce que nous sommes en présence d’une structure qui accueille des enfants malades. La relation qui existe entre cette œuvre et le reste de mon travail réside dans l’utilisation de matériaux et moyens qui, même s’ils changent à chaque fois, sont utilisés soit pour rechercher des possibilités et des limites, soit pour rendre visible une idée qui a comme unique moyen d’expression la réalisation de l’œuvre elle-même.
> Lorenzo Benedetti : Quelle sera, penses-tu, la réaction des visiteurs à ton projet ?
> Stanislao di Giugno : J’espère que les personnes qui passeront par là ressentiront simplement l’espace comme une ambiance naturelle. Avec la curiosité, l’émerveillement et la découverte que l’on éprouve par exemple en se promenant dans une forêt ou en faisant de la plongée. Je ne voudrais pas que l’œuvre soit perçue comme une œuvre d’art au sens strict. L’art peut et doit être une chose quelconque et dans n’importe quel lieu.
Stanislao Di Giugno, né en 1969 à Rome, vit et travaille entre Rome et Berlin.
Il est représenté par la galerie Tiziana di Caro.